L’admissibilité des présomptions de culpabilité
L’admissibilité des présomptions de culpabilité :
Section 1 – Les enjeux liés à l’admissibilité des présomptions de culpabilité
Dans un système où la responsabilité pénale repose sur un modèle libéral,
les présomptions de culpabilité n’ont pas lieu d’être.
En effet, leur application contredit en théorie le respect de plusieurs principes
constitutionnels (I).
Mais, en pratique, ce mécanisme est admis par la jurisprudence en raison
de la difficulté de rapporter la preuve de la culpabilité (II).
1) Les présomptions de culpabilité confrontées
à différents principes constitutionnels
(L’admissibilité des présomptions de culpabilité)
D’emblée, et par leur définition, les présomptions de culpabilité sont opposées
au principe de présomption d’innocence.
Cette évidence est traduite par la dualité qui oppose la culpabilité et l’innocence.
Le respect de la présomption d’innocence est l’enjeu primordial de ces présomptions
ainsi que le démontre l’étude des jurisprudences nationale et européenne
puisque c’est systématiquement au regard de
l’article 9 de la Déclaration des droits de l’Homme et
du citoyen et de l’article 6§2 de la Convention européenne des Sauvegarde des droits
de l’Homme que les présomptions de culpabilité sont contestées[73].
Mais, les présomptions de culpabilité sont-elles seulement un obstacle à la présomption
d’innocence ?
N’est-il pas possible d’arguer d’autres principes du droit pénal qui pourraient être
malmenés par ce mécanisme?
La réponse est positive et s’appuie sur trois principes directeurs du droit pénal :
le principe de légalité des délits et des peines (/A),
le principe de stricte interprétation de la loi pénale (/B)
et le principe de responsabilité pénale personnelle (/C).
Néanmoins, il convient de nuancer en amont les propos qui vont suivre :
il ne s’agit pas ici d’affirmer de façon équivoque que ces différents principes
directeurs de droit pénal sont violés par les présomptions de culpabilité.
Il s’agit simplement d’étudier les différentes confrontations auxquelles les présomptions
de culpabilité peuvent conduire.
A). — Les présomptions jurisprudentielles de culpabilité et
le principe de légalité des délits et des peines
(L’admissibilité des présomptions de culpabilité)
Ce principe constitutionnel garanti par l‘article 8 de la Déclaration des droits
de l’Homme et du citoyen est formulé de la manière suivante :
«Pas de crime sans loi, pas de peine sans loi».
Cela signifie que la répression ne peut pas exister si la loi elle-même ne prévoit pas
l’action ou l’omission, objet de l’interdit pénal.
Seul le législateur a le pouvoir de définir les infractions et les peines qui leur
correspondent.
Le juge, quant à lui, n’a pas le pouvoir de dire si telle ou telle action, ou telle
ou telle omission est socialement répréhensible, ni le pouvoir de créer des peines.
Pourtant, l’infraction de diffamation (article 29 de la loi de 1881) :
la diffamation à l’alinéa 1 pourrait illustrer une confrontation entre les présomptions
de culpabilité et le principe de légalité des délits et des peines.
En effet, lorsque le juge applique l’article 29 de la loi du 29 juillet 1881,
il n’est pas en mesure d’identifier l’élément moral puisque celui-ci n’est pas défini.
Alors, il va donc présumer que « toute imputation ou allégation »
est faite dans l’intention de porter atteinte à l’honneur ou à la considération de la personne.
Ainsi, les tribunaux vont fonder la culpabilité d’un prévenu
sur un élément de l’infraction qui n’est pas donné par la loi.
Cette présomption de culpabilité jurisprudentielle pose ainsi une difficulté au regard
du principe de légalité des délits et des peines.
B). — Les présomptions de culpabilité jurisprudentielles et
le principe de stricte interprétation de la loi
(L’admissibilité des présomptions de culpabilité)
Le principe de stricte interprétation de la loi pénale,
corolaire du principe de légalité des délits et des peines,
est prévu par l’article 111-4 du Code pénal selon lequel :
«La loi pénale est d’interprétation stricte».
Cela signifie que le juge n’a qu’une marge d’appréciation très réduite lorsqu’il
doit appliquer la loi.
Autrement dit, ce principe s’oppose d’une part, à l’interprétation analogique
qui consiste à étendre une règle de droit d’une situation prévue par elle à une
situation voisine et d’autre part, à l’interprétation restrictive
qui ferait échapper à la loi pénale des cas pourtant prévus par le législateur.
Or c’est concernant l’interprétation
analogique que les présomptions de culpabilité
peuvent soulever des difficultés.
(L’admissibilité des présomptions de culpabilité)
A titre d’exemple, le délit de fraude fiscale est défini par le législateur à la fois
dans son élément matériel et dans son élément moral[74].
Il va même jusqu’à préciser que la charge de la preuve incombe au ministère public
et à l’administration fiscale[75].
Pourtant, la jurisprudence s’écarte du texte d’incrimination
et fait application d’une présomption de culpabilité pesant sur le dirigeant social
lorsqu’elle considère
« qu’en l’absence de toute délégation de pouvoirs, le gérant est personnellement tenu
de se conformer aux obligations fiscales incombant à l’entreprise« [76].
Dès lors, cette présomption de culpabilité pourrait venir porter atteinte au principe
de stricte interprétation de la loi pénale
car l’application qu’en font les tribunaux s’écarte des dispositions
attribuant la charge de la preuve.
C). — Les présomptions de culpabilité et la responsabilité
pénale personnelle
(L’admissibilité des présomptions de culpabilité)
Le principe de responsabilité pénale personnelle est régi par
l’article 111-3 du Code pénal et prévoit que « Nul n’est responsable que de son propre fait».
Dès lors le droit pénal est incompatible avec des responsabilités du fait d’autrui comme
celles prévues par le Code civil.
En effet, celui-ci dans son article 1384 alinéa 1ᵉʳ vise différentes hypothèses de responsabilité
du fait d’autrui comme celle des parents du fait de leurs enfants ou encore celle des
instituteurs du fait de leurs élèves.
Pourtant, la présomption de culpabilité du producteur d’un site en ligne
est un exemple qui pourrait porter atteinte au principe de responsabilité du fait personnel
en droit pénal.
En effet, ce dernier est présumé responsable du message injurieux ou diffamatoire posté
par voie électronique sur le site à défaut de pouvoir établir
— soit la responsabilité du directeur du site,
— soit la responsabilité de l’auteur.
Dès lors, on pourrait transposer le sens de l’article 1348 alinéa 1ᵉʳ du Code civil à cette
présomption de culpabilité puisqu’il semblerait que le producteur du site est pénalement
responsable à raison « des choses » donc du site « qu’il a sous sa garde».
Ainsi les enjeux que soulève l’utilisation des présomptions de culpabilité dans
notre système de droit pénal peuvent être nombreux et importants.
Pourtant, la jurisprudence a admis l’utilisation de ce mécanisme, justifié par des difficultés
probatoires.
2) La validité des présomptions de culpabilité,
réponse aux difficultés probatoires
(L’admissibilité des présomptions de culpabilité)
En dépit des potentielles atteintes à la présomption d’innocence, les systèmes
pénaux aussi bien de droit conventionnel (/A)
que de droit interne (/B)
ont admis les présomptions de culpabilité.
Cela est justifié en raison des difficultés probatoires rencontrées.
A). — L’admissibilité en droit conventionnel
(L’admissibilité des présomptions de culpabilité)
La Cour européenne des droits de l’Homme est la première juridiction à
s’être prononcée sur l’admissibilité des présomptions de culpabilité.
Il s’agit notamment de l’arrêt Salabiaku contre France rendu le 7 octobre 1988[77].
Devant la Cour européenne, le prévenu avait argué du fait que l’article 392 §1 du
Code des douanes était contraire à l’article 6§2 de la Convention en ce qu’il établissait
une présomption de culpabilité.
En réplique, le gouvernement français avait donné un argument intéressant
selon lequel cet article n’édictait pas une présomption de culpabilité, mais de responsabilité :
« les personnes désignées ne commettent pas l’infraction elles-mêmes, mais en répondent
devant les tribunaux » (§24).
La Cour européenne des droits de l’Homme devait donc trancher la question suivante :
le fait de présumer de la détention de marchandises prohibées,
l’élément moral de l’infraction
constitue-t-il une violation de
la présomption d’innocence ?
La Cour a alors affirmé que : “Tout système juridique connait des présomptions
de fait ou de droit, la Convention n’y met évidemment pas obstacle en principe,
mais en matière pénale, elle oblige les États contractants à ne pas dépasser à cet égard
un certain seuil.
L’article 6§2 ne se désintéresse donc pas des présomptions de fait ou de droit qui se
rencontrent dans les lois répressives
Puis, elle a ajouté que : “Les juridictions françaises n’ont pas appliqué l’article 392 §1
du Code des douanes d’une manière portant atteinte à la présomption d’innocence”.
Ainsi, selon la Cour européenne, le mécanisme des présomptions de culpabilité
n’est pas un procédé qui brimerait la présomption d’innocence d’une façon telle que
celle-ci serait vidée de sa substance[78].
Les juridictions nationales ont adopté la même position avec certaines nuances.
B). — L’admissibilité en droit interne
(L’admissibilité des présomptions de culpabilité)
La Cour de cassation s’est prononcée sur la légitimité des présomptions
de culpabilité quelques années après la décision de la Cour européenne.
En effet, dans un arrêt rendu le 6 novembre 1991, la chambre criminelle a affirmé
au sujet de l’ancien article L.21-1 du Code de la route que :
“L’article 6§2 de la Convention, qui n’a pas pour objet de limiter les modes de preuve
prévus par la loi interne, mais d’exiger que la culpabilité soit légalement établie,
ne met pas obstacle aux présomptions de droit ou de fait instituées en matière pénale”[79].
Cet arrêt est intéressant dans le sens où il explicite l’objectif de la présomption
d’innocence.
En effet, selon la Cour de cassation celle-ci n’est pas une règle qui viendrait
restreindre les techniques probatoires, mais plutôt une règle qui serait le gage
“d’une culpabilité légalement établie”.
Cependant, on peut s’interroger sur le sens qu’il faut donner à cette expression.
S’agit-il d’une culpabilité établie par la loi et dans ce cas les présomptions de
culpabilité jurisprudentielles sont mises en difficultés ou alors, s’ agit-il, d’une
culpabilité en conformité avec la loi ?
Le Conseil constitutionnel, quant à lui,
s’est prononcé sur les présomptions de culpabilité
dans une décision rendue le 16 juin 1999[80] au sujet de l’ancien article L.21-2
du Code de la Route en estimant que :
“En principe le législateur ne saurait instituer de présomption de culpabilité en
matière répressive ; que toutefois à titre exceptionnel, de telles présomptions peuvent
être établies, spécialement en matière contraventionnelle […] (§5)”.
Là où cette solution est intéressante c’est que le Conseil constitutionnel hiérarchise
bien le principe est exceptionnel lui, le principe est que les présomptions de
culpabilité n’ont pas à s’appliquer en droit pénal conformément au principe de
présomption d’innocence.
Cependant, il ajoute que des exceptions peuvent être mises en œuvre notamment
en matière contraventionnelle[81].
Dès lors, cette formulation avancée par le Conseil constitutionnel semble être
l’acceptation des présomptions de culpabilité la plus respectueuse du principe
de présomption d’innocence[82].
Peu important, les nuances réalisées par les différentes juridictions,
elles ont toutes admis l’utilisation des présomptions de culpabilité en droit pénal.
Néanmoins, elles assortissent ce mécanisme d’un certain nombre de conditions.
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