Risque corporel pour autrui
Risque corporel pour autrui ;
Les actions occasionnant un risque corporel pour autrui, notamment
à l’égard des personnes vulnérables
Le droit pénal intervient généralement pour sanctionner le comportement
d’une personne ayant provoqué un dommage pour autrui.
Cependant, dans certaines situations, le droit pénal vient réprimer des comportements
qui n’ont pas causé de dommage, mais qui ont simplement causé un risque pour autrui.
Dans ce cas, bien qu’aucun dommage n’ait été causé, ces incriminations se justifient par
la volonté de réprimer des comportements particulièrement dangereux ou
de protéger certaines personnes vulnérables.
Ces infractions se retrouvent au sein du Chapitre III du Titre II du Livre II du code
pénal, intitulé « De la mise en danger de la personne »
et comprenant les articles 223-1 et suivants.
Les comportements incriminés au sein de cette section restent :
— le délit de risque causé à autrui (article 223-1),
— le délaissement d’une personne hors d’état de se protéger
— l’entrave aux mesures d’assistance et l’omission de porter secours
(article 223-5, 223-6, 223-7,
223-7-1),
— l’expérimentation sur la personne humaine (article 223-8),
— l’interruption illégale de grossesse (article 223-10),
— la provocation au suicide (article 223-13 et 223-14),
— et l’abus frauduleux de l’état d’ignorance ou de faiblesse (article 223-15-2).
I). — Le délit de risque causé à autrui
(Risque corporel pour autrui)
L’article 223-1 du Code pénal incrimine
« le fait d’exposer directement autrui à un risque immédiat de mort ou de blessures
de nature à entrainer une mutilation ou une infirmité permanente par la violation
manifestement délibérée d’une obligation particulière de prudence ou de sécurité
*imposée par la loi ou le règlement ».
La peine encourue reste d’un an de prison et de 15 000 euros d’amende.
A). — L’élément matériel
Par son comportement, l’auteur doit avoir exposé directement autrui à
un risque immédiat de mort ou de blessures de nature à entrainer une
mutilation ou une infirmité permanente.
Le comportement ne doit pas avoir entrainé de dommage pour autrui.
S’il y a réalisation d’un dommage, d’autres qualifications trouveront à s’appliquer.
Le comportement ici incriminé demeure un comportement dangereux de
nature à causer un dommage.
Ce comportement doit avoir exposé directement autrui à un risque immédiat
de mort ou de blessures.
Il doit donc exister un lien de causalité direct et immédiat entre le comportement
et le risque de mort ou de blessures.
B). — L’élément moral
1). — Le caractère particulier de l’obligation violée
Le comportement réprimé doit tout d’abord procéder de la violation d’une obligation
particulière de prudence ou de sécurité.
Cela suppose l’existence d’un texte précis énonçant l’obligation en question.
Il peut s’agir d’une obligation de faire ou d’une obligation de ne pas faire.
La violation d’une obligation générale de prudence ou de sécurité ne peut donc être sanctionnée
sur ce fondement.
2). — Le caractère légal ou règlementaire de l’obligation violée
L’obligation particulière de prudence ou de sécurité doit, ensuite, être imposée par la loi ou
le règlement.
Le règlement, au sens de l’article 223-1, correspond à un texte administratif, général et impersonnel,
qui pose une obligation de sécurité ou de prudence La chambre criminelle a pu juger, par un arrêt
du 10 mai 2000, qu’un arrêté préfectoral déclarant un immeuble insalubre et imposant à son
propriétaire des travaux de mise en conformité n’est pas un règlement au sens de l’article 223-1
du Code pénal. De même pour un règlement intérieur (Aix-en — Provence, 22 novembre 1995).
3). — Le caractère manifestement délibéré de la violation
Enfin, la violation de l’obligation doit manifestement être délibérée.
La faute est donc intentionnelle puisque l’agent doit avoir eu
et conscience et volonté de créer ce risque.
Il a eu la volonté d’un comportement risqué, mais pas la volonté
d’un comportement dommageable.
Certains auteurs nomment cet élément moral dol éventuel ou dol indéterminé.
II). — Le délaissement d’une personne hors
d’état de se protéger (Risque corporel pour autrui)
L’article 223-3 sanctionne
« le délaissement, en un lieu quelconque, d’une personne qui n’est pas en mesure
de se protéger en raison de son âge ou de son état physique ou psychique ».
La peine encourue est de 5 ans d’emprisonnement et de 75 000 euros d’amende.
A). — L’élément matériel
Le délaissement doit tout d’abord concerner une personne qui est dans
l’impossibilité de se protéger seule, par exemple, en raison de son jeune âge,
de son handicap ou de sa maladie.
Pour être sanctionné, l’acte de délaissement doit être un acte positif
« exprimant de la part de son auteur la volonté d’abandonner définitivement
la victime » (chambre criminelle, 23 février 2000).
De plus, le délit de délaissement ne peut être constitué qu’à l’encontre
d’une personne qui assume déjà la responsabilité de la prise en charge de la
victime (chambre criminelle 23 mai 2018).
B). — L’élément moral
Le délaissement d’une personne hors d’état de se protéger est un délit intentionnel.
Pour être sanctionné, l’auteur doit avoir eu la volonté de délaisser définitivement
la personne en ayant conscience qu’elle ne pouvait se protéger seule.
III— L’entrave aux mesures d’assistance et
l’omission de porter secours
(Risque corporel pour autrui)
A). — L’entrave aux mesures d’assistance
L’article 223-5 incrimine
« le fait d’entraver volontairement l’arrivée de secours destinés à faire
échapper une personne à un péril imminent ou à combattre un sinistre
présentant un danger pour la sécurité des personnes ».
La peine encourue est de 7 ans d’emprisonnement et de 100 000 euros d’amende.
L’élément matériel est constitué par l’acte de tenter d’empêcher l’arrivée
des secours par quelque moyen que ce soit.
Concernant l’élément moral, l’auteur doit avoir conscience du danger
et conscience que son acte entrave l’arrivée des secours.
B). — L’omission d’empêcher une infraction
L’article 223-6 al.1 dispose que
« quiconque pouvant empêcher par son action immédiate, sans risque pour
lui ou pour les tiers, soit un crime, soit un délit contre l’intégrité corporelle
de la personne s’abstient volontairement de le faire est puni de 5 ans
d’emprisonnement et de 75 000 euros d’amende ».
Le danger émane, dans cette situation, d’un crime ou
d’un délit contre l’intégrité corporelle de la personne.
Il est alors reproché à l’auteur de ne pas avoir agi lui-même
ou de ne pas avoir prévenu les secours afin d’empêcher la commission
de cette infraction, alors qu’il avait connaissance de l’infraction projetée.
Néanmoins, l’intervention qui était demandée à l’agent ne devait faire encourir aucun risque
à quiconque. La chambre criminelle a pu affirmer en ce sens, dans un arrêt rendu le 16 novembre
1955, que
« l’obligation d’agir n’est imposée qu’à celui qui a le moyen d’empêcher
le crime ou le délit sans risque pour lui et les tiers ».
C). — La non-assistance à personne en danger
L’article 223-6 al.2 dispose que
« sera puni des mêmes peines (5 ans d’emprisonnement et 75 000 euros
d’amende) quiconque s’abstient volontairement de porter à une personne
en péril l’assistance que, sans risque pour lui ou pour les tiers, il pouvait
lui prêter soit par son action personnelle, soit en provoquant un secours ».
Le législateur incrimine ici aussi une abstention volontaire,
alors que l’action était possible.
En revanche, il s’agit dans cette situation de l’abstention volontaire
d’empêcher un péril autre que la survenance d’une infraction.
Le péril peut procéder d’un accident ou d’une cause naturelle.
Il doit être imminent, c’est-à-dire non encore réalisé, ou actuel.
De plus, selon la jurisprudence, ce péril doit être d’une certaine gravité.
Par un arrêt rendu le 13 janvier 1955, la chambre criminelle juge que
« l’obligation de porter secours concerne seulement le cas de personnes
se trouvant en état de péril imminent et constant, et nécessitant une
intervention immédiate ».
Le texte dispense ici aussi l’agent d’intervenir lorsqu’un risque sérieux
existe pour lui-même ou pour un tiers.
Concernant l’élément moral, le délit est constitué dès lors que l’auteur,
bien qu’ayant conscience de la situation dangereuse dans laquelle se
trouve la victime, s’abstient volontairement de lui porter secours.
D). — L’abstention de prendre des mesures pour
combattre un sinistre
L’article 223-7 incrimine
« quiconque s’abstient volontairement de prendre ou de provoquer les
mesures permettant, sans risque pour lui ou pour les tiers, de combattre
un sinistre de nature à créer un danger pour la sécurité des personnes ».
La peine encourue est de 2 ans d’emprisonnement et de 30 000 euros d’amende.
Est ici en cause une situation qui peut conduire à un péril.
Par cette incrimination, le législateur incite à intervenir en amont du péril.
Il est reproché à l’auteur, qui avait les moyens de combattre le sinistre,
de ne pas avoir agi personnellement ou par l’intermédiaire d’un tiers.
Là encore, l’intervention devait être sans risque pour l’auteur ou pour les tiers.
Concernant l’élément moral, l’auteur avait conscience du sinistre et pourtant
la volonté de ne pas agir.
IV). — L’expérimentation sur la personne
humaine (Risque corporel pour autrui)
L’article 223-8 incrimine
« le fait de pratiquer ou de faire pratiquer sur une personne une recherche
mentionnée aux 1° ou 2° de l’article L.1121-1 ou sur un essai clinique mentionné
à l’article L.1124 — 1 du code de la santé publique sans avoir recueilli le
consentement libre, éclairé et, le cas échéant, écrit de l’intéressé, des titulaires
de l’autorité parentale ou du tuteur ou d’autres personnes, autorités ou
organes désignés pour consentir à la recherche ou pour l’autoriser ».
La peine encourue est de 3 ans d’emprisonnement et de 45 000 euros d’amende.
De plus, « les mêmes peines sont applicables lorsque la recherche interventionnelle
est pratiquée alors que le consentement a été retiré ».
Enfin, « les mêmes peines sont applicables lorsqu’une recherche non interventionnelle
est pratiquée alors que la personne s’y est opposée ».
La jurisprudence estime que
« le consentement libre, éclairé et exprès de la personne doit être recueilli préalablement
à la réalisation de la recherche biomédicale » (Paris, 1ᵉʳ mars 1996).
En outre, dans un arrêt rendu le 24 février 2009, la chambre criminelle confirme un
arrêt d’appel qui avait déclaré coupable de ce délit « un médecin ayant entrepris une
recherche biomédicale sur un patient très affaibli et manifestement dans l’impossibilité
de donner un consentement libre, éclairé et exprès ».
V). — L’interruption illégale de grossesse
(Risque corporel pour autrui)
L’article 223-10 incrimine
« l’interruption de grossesse sans le consentement de l’intéressée ».
La peine encourue est de 5 ans d’emprisonnement et de 75 000 euros d’amende
Pour que le délit soit constitué, la femme ne doit pas avoir consenti
à l’interruption de grossesse.
L’auteur doit avoir, quant à lui, pratiqué des actes abortifs en ayant
connaissance de l’absence de consentement de la victime et en ayant tout
de même l’intention de provoquer l’interruption de grossesse.
VI). — La provocation au suicide
(Risque corporel pour autrui)
D’une part, l’article 223-13 sanctionne le fait de provoquer au suicide
d’autrui, lorsque la provocation a été suivie du suicide ou d’une tentative
de suicide.
La peine encourue est de 3 ans d’emprisonnement et de 45 000 euros d’amende.
D’après l’alinéa 2, ces peines sont aggravées (5 ans d’emprisonnement et 75 000
euros d’amende) lorsque la victime est un mineur de 15 ans.
L’auteur de l’infraction doit avoir provoqué la victime à son suicide.
Cet acte de provocation doit être contraignant ou convaincant.
La provocation doit en outre être suivie d’effet par un suicide
ou une tentative de suicide.
Concernant l’élément moral, l’auteur doit avoir agi en ayant conscience
du caractère répréhensible de l’acte, mais aussi avec la volonté de voir
l’intéressé passer à l’acte.
D’autre part, l’article 223-14 incrimine la propagande ou la publicité,
quel qu’en soit le mode en faveur de produits, d’objets ou de méthodes
préconisés comme moyens de se donner la mort.
La peine encourue est de 3 ans d’emprisonnement et de 45 000 euros d’amende.
VII). — L’abus frauduleux de l’état d’ignorance
ou de faiblesse (Risque corporel pour autrui)
L’article 223-15-2 incrimine
« l’abus frauduleux de l’état d’ignorance ou de la situation de faiblesse
soit d’un mineur,
soit d’une personne dont la particulière vulnérabilité, due à son âge, à
une maladie, à une infirmité, à une déficience physique
ou psychique ou à un état de grossesse, est apparente ou connue de son auteur,
soit d’une personne en état de sujétion psychologique ou physique
résultant de l’exercice de pressions graves ou réitérées ou de techniques
propres à altérer son jugement, pour conduire ce mineur ou cette personne
à un acte ou à une abstention qui lui sont gravement préjudiciables ».
La peine encourue est de 3 ans d’emprisonnement et de 375 000 euros d’amende.
A). — L’élément matériel
L’abus se caractérise par une exploitation excessive de l’état de la victime
pour l’obliger à un acte (exemples : legs, dons, relations sexuelles)
ou une abstention (exemple : renonciation au remboursement d’un prêt)
qu’elle n’aurait pas fait en l’absence de cet abus.
Selon la jurisprudence, cet abus consiste en des « pressions graves et réitérées »
(Paris, 8 mars 2010, ch.crim. 27 octobre 2015) entrainant chez la victime
un état de sujétion psychologique.
L’auteur doit profiter de l’état d’ignorance ou de faiblesse de la victime qui
trouvera sa source, par exemple, dans la fragilité psychologique de la victime.
B). — L’élément moral
L’état de faiblesse de la victime devait être « apparent ou connu » de l’auteur
qui en a abusé pour obtenir l’acte ou l’abstention
Les peines encourues sont aggravées à 5 ans d’emprisonnement et de 750 000 euros d’amende
« lorsque l’infraction est commise par le dirigeant de fait ou de droit d’un groupement qui
poursuit des activités ayant pour but ou pour effet de créer, de maintenir ou d’exploiter la sujétion
psychologique ou physique des personnes qui participent à ces activités » (art 223-15-2 al.2).
VIII). — Contacter un avocat
(Risque corporel pour autrui)
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En fait,
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